Du découragement des maires aux gilets jaunes : des fractures territoriales...
Du découragement des (petits) maires…jusqu’aux gilets jaunes : une crise de société
On ne lit, on n’entend qu’eux : ce sont les grands élus, les députés, les sénateurs, qui ont le droit d’exprimer le blues des maires des (petites) communes, mais très peu ces derniers ; et ce sont tous les pouvoirs, de droite comme de gauche, qui leur passent de la pommade avec des solutions approximatives…comme en cet automne. Malheureusement il n'y a pas de solidarité entre les (petits) maires face au langage technocratique, maintenant porté par le projet de loi « Engagement et proximité » ; comment dès lors s’étonner qu’ils préfèrent déserter à près de 50 %. Tout pouvoir veut toujours réussir ses réformes, même en passant en force ou en biaisant…
La doxa – la Pensée unique - refuse de prendre en compte les raisons précises qui ont conduit à la lente mise à mort des (petites) communes, situation pourtant vécue existentiellement par les (petits) maires. La commune était un réseau de liens anthropologiques, profondément humains. A l’image de toute la société, la société villageoise est maintenant éclatée, désertée, atomisée, déshumanisée, désaffiliée de « l’histoire et du territoire » (Marcel Gauchet). La Réforme territoriale, la loi Notre, ont accentué cette tendance générale en se basant sur un processus de concentration / fusion / disparition des collectivités territoriales, de prise en main à un niveau éloigné de la démocratie de proximité des pouvoirs, des finances par les décideurs. Il est évident qu’après les Elections municipales cette volonté de moins en moins occulte ira jusqu’au bout – sur la lancée de la métropolisation – avec le grossissement d’intercommunalités XXL, les regroupements de communes dans les contestées « communes nouvelles »…Seule une consultation citoyenne par référendum serait démocratique, principe qui doit figurer dans les prochains programmes municipaux...
Depuis deux siècles, les (petits) maires et leurs équipes ont travaillé comme les grands à faire vivre leurs territoires autour du local, du patrimonial, du culturel, du vivre-ensemble…de l’économique aussi. Ils ont vécu en une décennie une grave dépossession de leur rôle et une dégradation de la commune, par une technocratie proche – la Communauté des Communes – et lointaine – la nébuleuse pilotée depuis Paris…En conscience, certains n’acceptent pas la capitulation collective qui a été la seule réponse, sans esprit critique …A partir d’un langage mensonger imposé habilement par les grands élus, pipant les dés, ce contexte pourri sème la confusion dans les esprits, permet les arrangements avec sa conscience, entraîne le fatalisme…Des intercommunalités de plus en plus technocratiques ont imposé les transferts de compétences, une concentration urbaine et technocratique dont l’expression majeure est l’urbanisme du PLUI et du SCOT qui accentuent la logique centralisatrice et désertificatrice de l'occupation humaine des territoires…etc Nos (petites) communes se meurent dans leur énergie propre, leur diversité, leur identité, leur âme…Se pose une question sociologique, politique, anthropologique : quelle place reste-t-il aux humains vivant dans leurs communautés de proximité ? 30 % des Français vivent dans des communes de moins de 2500 habitants. Les générations qui ont vécu cette évolution en quelques décennies en sont les témoins dépités. Quelle société allons-nous laisser aux jeunes générations ? Peuvent-elles comprendre le processus dramatique qui conduit à toutes ces impasses ? La question climatique par exemple n’est que la résultante d’une vaste question de l’évolution de nos sociétés urbaines reniant leurs bases rurales et agricoles…sur toute la planète.
Quand rien ne va plus dans l’organisation humaine, la puissance publique semble délier les cordons de la bourse. Le projet de loi propose « une indemnité à la hauteur des responsabilités » : proposition inadéquate, hélas, pour les budgets étriqués des (petites) communes, sans aide de l’Etat ! Eternel langage mensonger qui refuse de voir la teneur des problèmes et avance masqué ! Sans « l’engagement » des maires et des 550 000 élus bénévoles, la « proximité » démocratique avec les citoyens, les belles intentions ne seront qu’emplâtres sur jambes de bois.
Ce n’est donc que si les futures équipes municipales échafaudent des programmes de résistance à cette évolution ruralicide et liberticide que les (petites) communes auront encore un sens, pour dépasser la soumission des élus que le système technocratique leur a imposée, pour construire ensuite de véritables alternatives au mouvement dramatique de concentration urbaine et métropolitaine synonyme des diverses désertifications pour les autres territoires (commerciale, industrielle, médicale, scolaire…).
Le rôle d’animation des villages par les équipes municipales, à tous les niveaux (économique, humain surtout…) – ce qui n’est pas évident – est l’indispensable condition pour donner un avenir, un sens positif au rôle de plus en plus ingrat du maire, qui, sinon, se résume à gérer les incidents, les conflits…Un engagement de fond est nécessaire, au-delà de la convivialité bienveillante à la mode… pour faire face à la baisse des dotations, bien problématique pour les (petits) budgets : les (petites) communes ne subsisteront que si elles se prennent vraiment en mains…
Comment les pyromanes de la technocratie pourraient-ils éteindre le feu qu’ils ont allumé dans notre organisation démocratique et territoriale ? Il ne faut pas attendre non plus des Congrès des maires qu’ils répondent au découragement des (petites) communes avec leur habituel double langage…
Ce sont toujours les petites collectivités qui font les frais de l’alibi de l’austérité financière, de l’énorme déficit public : on se pose moins de questions quand il s’agit des dépenses somptuaires des grandes collectivités, que l’on pourrait citer…
Comment le gouvernement peut-il vouloir redonner du sens au rôle de la commune et de leurs élus, et en « même temps » pousser à leurs regroupements ? Comment le Président des Maires de France issu de la Droite peut-il faire de la fracture territoriale son cheval de bataille en même temps qu’il affirme que l’Etat ne peut plus être « présent » dans tous les territoires ? Comment le Parti Socialiste peut-il défendre la ruralité alors qu’il était à la manœuvre pour mettre en place la Réforme territoriale et la loi Notre, dont la scélérate volonté souterraine est bien l’absorption de l’échelon communal ?
Au demeurant, qu’ont fait les gouvernements successifs sinon accepter d’être corsetés par le système néolibéral, c’est-à-dire l’injuste mondialisation capitaliste, son libéralisme financiarisé, ses élites déconnectées, sa technocratie urbaine ?
Le mouvement des « Gilets jaunes » est la caisse de résonnance de ces fractures territoriale, sociale, économique, anthropologique. Ce n’est qu’en dressant un diagnostic au cœur des territoires minoritaires et des cultures minuscules, que l’on peut défendre vraiment cette ruralité, cette « périphérie » dont trop d’hommes de pouvoirs parlent la main sur le cœur… sans changer les choses. L’état des lieux de notre société en crise, mis en lumière par la crise des « Gilets jaunes » sur les ronds-points français, permet de remonter aux causes, auxquelles tôt ou tard il faudra répondre pour pacifier la société.
Il est certain que la crise de fond de nos sociétés perdurera de manière plus ou moins larvée, car il s’agit d’une « énorme crise de civilisation et d’une énorme crise de l’humanité suscitée par la mondialisation déchaînée », selon le jugement d’Edgar Morin, « une crise anthropologique » selon d’autres penseurs, qui révèle les dérives d’un modèle de société technologique, technocratique, numérique, conduisant fatalement au processus des injustices dramatiques entre les concentrations urbaines d’un côté, les désertifications rurales de l’autre… Face aux puissances financières, sauvegardera-t-on les valeurs humanistes d’un aménagement équilibré des territoires ?
Tous les problèmes de notre société sont sur la table, développés dans les « Cahiers de doléances et de propositions » lancés par l’Association des maires rurauxet par le « Grand Débat », et repris comme on le sait par le Président de la République.
Saubanere Gérard
De tout cœur avec vous en tant qu'ancien chasseur à l'ortolan et au pinson , je serai heureux de pouvoir retrouver me passion en tout légalité !!!
pignon bernard
pour que continue de vivre les chasses traditionelles